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Photo du rédacteurAsso. L'Arcu Di Sperenza

DIS-MOI SYLVIA…

Dernière mise à jour : 10 avr. 2021

A l'aube du premier stage de Polyphonies corses que nous avions organisé en avril 2019 et dont Sylvia Micaelli était l'animatrice, un échange a eu lieu avec Joanne D'amico, son amie et ancienne stagiaire de Jacky Micaelli décédée en septembre 2017 :


Sylvia Micaelli, fille de Jacky Micaelli, est présidente de l'association L'arcu di sperenza, animatrice des stages de Polyphonies corses, membre du Trio FIAMMA
Sylvia Micaelli, présidente de L'arcu di sperenza, animatrice des stages de Polyphonies corses, membre du Trio FIAMMA

Joanne : Sylvia, explique-moi les raisons qui t'ont poussées à créer l'association « l'Arcu di Sperenza ». Est-ce parce que tu as envie de partager ?


Sylvia :Oui. En quelque sorte. La seule chose que je peux partager avec toi, avec les autres, c'est moi ! Une partie de mon histoire, comment la transmission de la polyphonie profane et sacrée s'est faite pour moi et comment, à mon tour, j'ai envie de perpétrer cette tradition ancestrale, que j'ai héritée de ma mère, Jacky Micaelli, chanteuse corse reconnue, décédée en septembre 2017.


Joanne : Au décès de Jacky, j'ai entendu beaucoup de personnes te dire qu'il fallait absolument que tu reprennes le flambeau, que c'est ce qu'elle aurait voulu...


Sylvia : Je ne pouvais pas m’éteindre en même temps qu’elle ! Elle tenait tant à cette chaîne de la transmission du chant polyphonique, dont elle et moi étions deux maillons.

Il m’a fallu quelques mois, le temps nécessaire à mon « travail de deuil » (bien que je ne sois pas en mesure de t'en donner une définition précise) pour me donner les moyens de concrétiser un de ses souhaits : reprendre le flambeau…

Joanne : C'est tellement légitime !


Sylvia : C'est un cheminement… J'ai, pour ainsi dire, « baigné » dans le chant depuis mon plus jeune âge. J'ai suivi pratiquement tous les stages de chants que ma mère animait dans différents lieux et, à ses côtés, je soutenais le travail des voix de tierce.

J'ai évolué dans ce domaine et je me suis émancipée.


Joanne : Tu faisais partie du groupe « U Ponticellu » et tu chantais avec ta mère en concert...


Sylvia : Oui. J’ai participé à la réalisation de deux albums. Le premier, intitulé « Stella Matutina », est composé essentiellement de chants polyphoniques sacrés dédiés à la vierge. Le second « Corsi’tania », représente une passerelle entre la Corse et l’Occitanie. Ce dernier est composé de chants profanes corses et occitans. J’ai eu la chance de vivre de belles aventures et de connaître la scène.


Joanne : Et sur le plan pédagogique, est-ce que tu te sens prête ?


Sylvia : Pendant toutes ces années, où j’ai participé aux stages de chants polyphoniques corses, animés par ma mère, j’ai mieux appris de cette tradition orale. Non pas sur le plan historique (cela ne faisait pratiquement pas partie de sa pédagogie, dans le sens où il n’y a pas eu un approfondissement du savoir), mais sur l’expérience même de la transmission orale. L’outil incontournable des stages étant un enregistreur audio, aucune partition n’était distribuée aux stagiaires.


Joanne : De toute façon, le chant corse est principalement de tradition orale. Il ne nécessite pas de connaissances musicales particulières. Il demande surtout de l'oreille et la volonté d'acquérir une certaine technique, qui n'a rien à voir avec celle que l'on apprend dans une chorale, par exemple. Même le placement de la voix est différent...


Sylvia : Tu as raison. J'ai appris la technique de la polyphonie avec « le tuilage des 3 voix » (basse, seconde et tierce) : J'ai été surprise d'entendre ce que l'on appelle « la voix des anges » : l'harmonique qui apparaît lorsque toutes les voix sonnent justes aux accords.

Un jour j'ai trouvé mon « passage » de la voix comme un nouveau-né trouve le sien pour venir au monde : une expérience marquante… J’ai appris à canaliser et à intérioriser mes émotions là où d’autres révèlent les leurs… Le chant c’est se mettre à nu, « le passage de la voix » c’est un peu comme un accouchement, une « re-naissance » de soi.


Joanne: Les chants profanes, les « Paghjelle », font partie de la tradition populaire. Ce sont des chants de fêtes, des chants de bergers, parfois des chagrins racontés ... Mais ce que je préfère, ce sont les chants sacrés. Ils ont le pouvoir de nous élever. Ils donnent souvent le frisson. Personnellement, j'ai l'impression d'être meilleure quand je chante un chant sacré !


Sylvia : Je pense comprendre ce dont tu parles Joanne ; je ressens aussi quelque chose de similaire lorsque je chante des chants sacrés. En effet, Je ne suis pas « croyante pratiquante », mais j’ai la foi et je situe mon cheminement dans une quête spirituelle. Le chant me parle au cœur.


Joanne : C'est ça ! Comme quand ta mère nous disait de ne pas forcément chercher à chanter beau, mais à chanter Vrai ! Quand on chante, on ne peut pas tricher. C'est de l'émotion qui s'offre...


Sylvia : En effet, lorsque l’on chante AVEC le Cœur, il n’y a pas de tricherie ; c’est l’Authenticité. Lorsque l’Authenticité est présente, au-delà de la technicité, le résultat est là : l’émotion et la communion sont au rendez-vous. Pour moi, le chant ne s’explique pas, il ne s’intellectualise pas : il se ressent. L'important, pour moi, c'est ce que je ressens lorsque je chante ou lorsque j’écoute chanter, ce sont les émotions que me procure ce chant, cette expérience de « transcendance », cette sensation électrique dans tout le corps, qui te fait hérisser les poils, qui se transmet au public et qui, parfois, délivre le corps et l’âme par quelques larmes.


Joanne : je suis contente d'avoir été à tes côtés pour t'encourager à créer l'association « L'arcu di Sperenza ». L'aventure commence...


Sylvia : Oui ! L’aventure commence ! En avril 2019, du 22 au 27 inclus, je vais organiser et animer mon premier stage de chants au couvent de Corbara. Je ne peux pas te dire ce qu'il en sortira, mais il faut un premier pas... Ce lieu témoin d'une grande et belle aventure de plus de 10 ans est empreint de l'âme de ma mère. Ce sera, en tout cas, très émouvant.


Sylvia Micaelli et Joanne D'Amico accompagnées par une partie des stagiaires au couvent de Corbara lors d'un stage d polyphonies corses organisé par l'association L'Arcu Di Sperenza
Sylvia Micaelli et Joanne D'Amico accompagnées par une partie des stagiaires

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